Fille du vent (titre provisoire) roman fantastique

En cours d'écriture.... Pour tout public. Les aléas de la vie font que j'ai des difficultés à poursuivre l'aventure avec mes personnages.

Résumé : Gabin a rendez-vous à la cabane avec Nina, une jeune fille tsigane dont le camp s'est installé près de la propriété de Zélia. Elle ne vient pas... il ne la reverra sans doute jamais.


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Fils du vent sans pays 

Préface

 

 

Tsiganes, Gitans, Bohémiens, Manouches  ou Romanichels, sans domicile ni résidence fixes, aujourd’hui, bien que seulement 15% de notre peuple l’est, nous sommes catalogués par la loi, de « forains », ensuite de « nomades » ou de « gens du voyage ». 

Arrivés de la « Petite Egypte », nom que nous avions donné à notre pays d’origine, le Péloponèse, au XVe siècle ; nous sommes des amuseurs publics, dresseurs de chevaux mais restons des voleurs de poules et d’enfants, le bouc émissaire de tous les maux de la société à jamais maudits pour avoir fourni les clous de la crucifixion du Christ.

Comme les juifs, nous avons goûté aux camps d’extermination nazis. Afin de nous reconnaître, le Z de zigeuner (tzigane en allemand) a été tatoué sur notre bras. Cette lettre nous le rappelle douloureusement, c’est pourquoi nous préférons le S pour l’écriture de tsigane.

 

Levna, tsigane, cueilleuse et magicienne…

 

Prologue (première partie)

 

Quelle délicieuse tâche que d'aider les jeunes idées à éclore, de soigner ces tendres plantes et de voir leurs boutons éclorent jour par jour.

Anne Brontë

 

 

 Cinq jours que Gabin l’attendait, ce vendredi. Les cours avaient repris depuis une semaine, avec, bien entendu, la contrainte de l’internat. Le voyage du retour lui paraissait toujours très long. La tête appuyée contre la vitre, son esprit vagabonda là-bas au village, plus précisément du côté du camp tsigane, vers Nina… une onde de chaleur inonda sa poitrine. Dans une heure, il la retrouverait à la cabane.

Chaque fois que ses yeux d’adolescent amoureux se posaient sur le visage de Nina à la peau si mate, l’émotion le submergeait et empourprait ses joues. Sa beauté, sans artifice, pouvait rivaliser avec celle, sophistiquée, des filles du lycée qui voulaient toutes ressembler à ces bimbos illustrant les pages des magazines et les écrans du Net. Certaines mèches auburn décolorées par le soleil contrastaient avec le reste de ses cheveux noirs très courts. Un air mutin dû à son petit nez retroussé tacheté de roux et deux fossettes de part et d’autre de sa bouche quand elle souriait, la rendait fascinante.

D’un an sa cadette, elle suivait son cursus scolaire, dispensé par son grand-père, au camp. Le primaire accompli dans un établissement public en Suisse elle n’avait pas voulu tenter le collège. Les moqueries et le racisme au quotidien pendant sa dernière année de cours moyen l’en avaient dissuadée. Quelquefois, Gabin l’aidait, surtout en mathématiques, matière qu’elle exécrait.

Extirpé de ses pensées par l’arrêt du minibus au lieu-dit les quatre routes, il empoigna son bagage et se leva. La porte pneumatique s’ouvrit. Il salua ses amis, le chauffeur, et descendit.

D’un pas alerte, il rallia la maison familiale et, sous l’une des dalles de la terrasse, récupéra la clé. Son sac à dos balancé sur une chaise de la cuisine, il prit un pain au chocolat dans le placard, l’engloutit en deux bouchées et poussa le tout avec un grand verre d’eau. Devant le miroir du vestibule, d’une main experte, il rabattit ses longs cheveux châtains en arrière et les emprisonna sur la nuque avec un élastique. Grand, mince, d’allure sportive, élève studieux de seconde, il se moquait bien de plaire aux filles, sauf à une : Nina !

Avec impatience, il récupéra son VTT dans le garage et fila à son rendez-vous…

En cette fin de journée, le soleil chatoyait le paysage et la terre encore chaude. Sur le sentier, feuilles mortes et brindilles craquetèrent sous les roues. Au détour d’un bosquet de noisetiers, prisonniers des lianes épineuses du roncier, elle apparut. Construite trente ans plus tôt, par son père et ses copains, la petite masure portait fièrement les marques du temps. Planches voilées ou pourries laissaient filtrer la pluie et le vent. Elle accueillait, néanmoins, la nouvelle génération d’amoureux. Les trois frênes sur lesquels ses fondations s’appuyaient, à un mètre cinquante du sol, formaient désormais autour, un écrin de feuillage touffu.

Gabin mit pied à terre, cala son vélo contre l’un des troncs et s’empressa de grimper à l’escalier de bois. Il dut expirer longuement pour calmer ses palpitations. D’une main preste néanmoins délicate, il rabattit la porte en branches de noisetier tressées maintenue par l’unique charnière d’osier. Désappointé, il constata l’absence de Nina.

Bah, elle sera tombée sur un coin d’enfer, elle a bien raison d’en profiter.

Comment pourrait-il lui en tenir rigueur ? Ces cueillaisons journalières rapportaient un pécule non négligeable à la communauté et lui permettraient de passer l’hiver au coin du feu à tresser des paniers, selon la tradition tsigane.

Il s’assit sur l’unique mobilier, un casier à bouteilles en bois, et sortit son portable non pas pour joindre Nina qui n’en avait pas mais pour jouer. À la troisième partie, l’inquiétude grandissante, il s’interrompit. Un jappement le rasséréna. Il bondit hors de la minuscule pièce, la mine fendue d’un large sourire qui s’estompa illico.

— Qu’as-tu fait de ta jolie maîtresse ? Pourquoi l’as-tu laissée seule ?

 Dehors, un chien trépignait et virevoltait. De race indéfinie, sa ressemblance avec le chien sauvage emblématique d’Australie, le Dingo, au pelage moutarde, lui avait valu le surnom de « Le Jaune ». Arrivé en début d’hiver au camp, l’an passé, en piteux état, l’oreille gauche partagée en deux, il s’était installé, sans demander l’avis de quiconque, et pris d’amitié pour Nina et sa famille.

L’animal gémit, piaffa et fit demi-tour. Soudain, Gabin vit sa nuque rougie.

Il est blessé. Mais alors Nina…

— Eh ! Attends-moi !

L’adolescent descendit si brusquement que l’un des barreaux de l’échelle fragilisée par les intempéries, céda sous son poids. Il enfourcha son V.T.T. et rattrapa le chien, non sans difficulté. Pas très facile de suivre ses slaloms entre les arbres. Pour amorcer la côte, il changea de braquet, et « en danseuse » parcourut ainsi près de deux kilomètres. Sur le plat de la piste du signal, il longea les sapinières pour atteindre le champ, La Grosle, celui où Nina avait pour habitude de cueillir les fleurs sauvages, herbes folles ou plantes médicinales.

Le Jaune stoppa net et se figea. La roue avant du vélo faillit buter contre. Oreilles dressées, -la gauche tint un quart de seconde à peine, puis ses deux lambeaux retombèrent instantanément-, pointées vers l'horizon, une patte avant levée, une patte levée, tel un chien d'arrêt, il observa la lisière du pré. 

Gabin avança, repéra, dans l’herbe, le panier renversé et la récolte éparpillée.

Jamais elle n’aurait gaspillé une telle quantité de fleurs !

— Nina ! Niiiiina ! Où te caches-tu ?

Le Jaune avait compris que sa petite maîtresse n’était pas là et commença sa danse. Impatient et apeuré, il tourna, tourna.

Un quart d’heure durant et d’un pas précipité, Gabin, ignorant Le Jaune, fit le tour du pré. Il eut beau hurler, seule la forêt voisine faisait écho à son appel. L’appréhension le gagna quand il découvrit, sous un bosquet, sa bicyclette et le sac de jute à moitié rempli.

Plus le soleil déclinait, plus l’obscurité s’intensifiait. Gabin se positionna en direction du camp de Boboko, l’aïeul de la jeune fille. Il l’aurait volontiers appelé, mais ne connaissait pas le numéro de son portable.

Le chien ne l’entendit pas de cette oreille, il se mit debout et plaqua, avec une telle brusquerie, ses pattes avant sur la poitrine du garçon, qu’il le déséquilibra.

— T’as gagné, je te suis !

Gabin tout en se frottant le torse, comprit que c’était ici que Nina avait disparu et ici que Le Jaune avait été agressé, sans doute en voulant défendre sa jeune maîtresse. Il reprit son vélo et la piste du signal qui ralliait le sentier des vignes, derrière le chien. La truffe au ras du sol, il semblait savoir où la trouver car il s’élança soudain. Le garçon accéléra et, au sommet, le distingua assis devant un bâtiment à demi enfoui, un buron abandonné. Une minuscule pièce en pierre recouverte de lauzes ou d'ardoises, dans ce pâturages d'altitude exploité par les éleveurs de la vallée de façon saisonnière. Dissimulé sous une butte herbeuse, seules la porte et quelques pierres restaient visibles.

— Tu crois qu’elle se cache là-dedans ?

La réponse, mi-grognement mi-gémissement, n’avait rien de rassurant.

 Gabin tenta, en vain, à coups d’épaule et de pieds, d’ouvrir la vieille porte, cadenassée et consolidée par des tiges de métal. Découragé, il s’assit près de l’entrée et sortit son téléphone pour lire l’heure.

Zut ! Je vais me faire allumer !

Il envoya un texto à sa mère.

« T’inquiètes pas. Suis à la recherche de Nina. Biz ».

À ses pieds, éclairé par l’écran, un objet scintilla. Il s’en empara et le reconnut.

Le bracelet de Nina !

Désemparé et d’une main fébrile, il glissa le bijou dans la poche arrière de son jean.

Inutile de rester là plus longtemps.

La ferme de Zélia, la sœur de Boboko, était à proximité du camp tsigane. Il s’arrêterait d’abord là. Nina y séjournait souvent afin d’étudier les propriétés médicinales des plantes cueillies. Le Jaune fut d’accord cette fois-ci. Déphasé et à une vitesse vertigineuse, Gabin longea la piste des Vignes, puis celle de la cabane, enfin les prairies.

Chaque coup de pédale était ponctué par l’apparition d’images plus sombres les unes que les autres et quand il voulut avaler sa salive, sa gorge se bloqua.

Zélia décrochait son linge de l’étendoir. Elle l’entendit s’approcher et se retourna.

— Bonsoir, mon petit.

Dans son désarroi, il en oublia la politesse, posa juste la pointe du pied à terre et articula :

— Nina est là ?

Zélia eut à peine le temps d’ouvrir la bouche pour lui répondre que déjà, le jeune homme repartait. Désappointée, elle le regarda s’éloigner.

— Ah, ces jeunes, toujours le feu ou je pense !

À l’entrée du camp, il pila. Le cri strident des freins et le crissement des pneus sur le gravier, attirèrent l’attention de plusieurs personnes, dont Boboko, qui pointa le nez hors de sa caravane.

— Eh ! gavalo [1], que se passe-t-il ? lança-t-il avec un accent germanique.

— Nina est rentrée ?

— Non. Et, maintenant que tu le dis, elle devrait être là depuis une bonne demi-heure. La nuit tombe, qu’est-ce qu’elle peut bien y voir ? Où est-ce qu’elle se cache !

Gabin répondit dans un souffle.

— En tout cas, elle n’est plus à La Grosle ni chez votre sœur ! J’en viens.

De la poche arrière, il sortit le bracelet et le brandit.

— Je l’ai trouvé devant le vieux buron. J’ai tenté de forcer la porte. Impossible ! Elle est cadenassée.

— Bon dieu ! Qu’est-ce qu’elle est allée foutre là-haut ? Ah ces minches[2] !

Boboko souleva son panama de la main droite et avec l’autre aéra sa chevelure grisonnante bouclée et désordonnée. La soixantaine bien sonnée, sous un visage buriné par le temps, une stature robuste et austère se cachait un homme au grand cœur.

— J’ai… aussi…

Gabin, devant la colère du patriarche, osa à peine poursuivre.

— Quoi ! éructa le vieil homme.

— Son panier… son panier est abandonné là où elle va d’habitude… à La Grosle. Et… Le Jaune a une blessure à la tête.

Compte-tenu de la colère du vieil homme, Gabin omit sciemment de mentionner la découverte du vélo et du sac rempli de fleurs.

Boboko, ne tergiversa pas une seconde de plus, envahi par un mauvais pressentiment.

— Tiago, Yvanno, ramenez vos fesses, j’ai besoin de vous !

Deux hommes dégingandés au teint basané et à la chevelure d’ébène, accoururent abandonnant ainsi leur travail.

Le grand-père descendit lestement les marches, ouvrit l’abri de jardin, entra et ressortit avec une pince à décoffrer. Il s’arrêta devant le chien et inspecta sa blessure. La coupure, propre, nette et peu profonde, avait dû être faite avec la serpette. Seul l’épiderme avait été touché. Gabin en profita pour lui remettre le bracelet de Nina.

— Merci ! Allez, gamin, grimpe à l’avant et montre-moi le chemin le plus court.

— Par les coupe-feux [3], on sera vite aux sapinières, ensuite ce n’est qu’à une cinquantaine de mètres.

— Yvanno ! Mets son pélaré sur le plateau.

Le plus grand s’exécuta, souleva et posa le V.T.T. à plat, gravit ensuite le marchepied à la suite de Tiago. Bien entendu, Le Jaune, d’un bond, s’invita et se blottit entre les hommes déjà assis. Le véhicule brimbalant sur la piste, longea les forêts de conifères, bifurqua à droite et stoppa en face de la butte d’herbe et de pierre, plein phare.

— Petit, prends la torche dans la boîte à gants.

Gabin s’exécuta. Le chef se pencha en avant et saisit, sous son siège, le pied de biche.

Simultanément, ils sortirent et se postèrent devant l’entrée du buron.

Boboko glissa la partie arrache-clous de l’outil entre la pierre et le bois. Sous la pression et avec l’aide d’Yvanno, la porte céda dans un grincement sinistre et s’ouvrit sur une minuscule pièce sombre utilisée jadis par les bergers. D’un geste sec, le chef jeta la barre sur l’herbe.

— Donne de la lumière, exigea-t-il.

Gabin pressa l’interrupteur et balaya le faisceau d’abord sur les murs et ensuite au sol. Ce qu’ils découvrirent les laissa muets d’effroi. Sur une litière de paille souillée de sang séché, une basket, elle aussi maculée. Un simple coup d’œil suffit, Boboko reconnut celle de sa petite-fille.

Il écarta les bras pour chasser tout le monde et vociféra. Sa manière à lui de masquer son trouble.

— Dehors !

La violence déployée pour refermer la vieille porte sur l’inquiétant tableau laissait imaginer l’ampleur de son désarroi.

Il s’isola. D’un revers de manche, s’essuya les yeux, et prévint les autorités.

Assis côte à côte sur le sommet du buron, ils attendirent en silence, les yeux rivés au sol. Ceux de Gabin s’humidifièrent et il ne put contenir un sanglot. Il sortit son téléphone, sélectionna le numéro de son domicile et laissa un second message pour éviter à sa mère de s’inquiéter inutilement.

Tiago lui tapota le dos d’une main qui se voulut rassurante.

Une demi-heure plus tard, un gyrophare commença à bleuir la route de campagne et une sirène emplir l’obscurité de l’espace.

 

 

 



[1] Gamin, jeune

[2] Filles

[3] C’est une coupe forestière linéaire créée et entretenue pour freiner l’extension rapide d’incendies.

 

 

 

 

Prologue (deuxième partie)

 

Boboko, les deux hommes et Gabin se levèrent et se plantèrent devant l’entrée du buron.

Trois gendarmes descendirent de la fourgonnette. Le chef, sans aucun doute, les bras en croix, après un « bonsoir » sec les fit tous reculer.

— Êtes-vous entrés ?

Boboko répondit et assura qu’ils n’avaient rien touché et tendit le bracelet de Nina.

— Le petit a trouvé ça devant la porte.

— Suivez-moi ! grogna le brigadier en glissant le bijou à l’intérieur d'une pochette stérile.

Il remonta dans son véhicule et s’assit devant un écran d’ordinateur, portière ouverte.

— Quel âge a votre fille ? héla-t-il.

Boboko s’avança.

—  Ma petite-fille. Quinze ans.

— Quelle tenue portait-elle aujourd’hui ? Il me faudrait une photo récente pour la diffuser sur le site Internet de la gendarmerie.

Le grand-père, tourmenté, sortit son portefeuille, l’ouvrit et en extrait avec difficulté, empoté avec ses gros doigts tremblants, le portrait écorné.

— Je n’ai que celle-ci qui date de l’année dernière. Aujourd’hui, ses cheveux sont courts.

— Ses vêtements ?

— Heu… je crois qu’elle était en jean … oui c’est ça… chemise à carreaux avec un gilet par-dessus.

— Bien, bien… conclut l’agent. Et la couleur ?

— De la chemise ? Vert et blanc.

— Le gilet ?

— Bleu marine.

— Une dernière chose, quel est son groupe sanguin ?

— A-

En raison du sang retrouvé sur les lieux, de l’âge de la jeune fille, le brigadier donna aussitôt l’alerte enlèvement. La scientifique débarqua une heure plus tard et délimita le périmètre de la scène par une bande orange et blanc, interdit au public tant que l’examen des lieux ne sera pas terminé.

La nuit tomba. Pourtant la gendarmerie et les experts ne remirent pas au lendemain l’examen du pré de La Grosle, sous peine de voir disparaître des preuves qui permettraient de faire avancer l’enquête. Le brigadier regagna l’estafette, ordonna à Gabin de monter avec lui et de lui montrer le chemin. Le tout terrain de Boboko les suivit, à bonne distance.

Les véhicules se garèrent assez loin pour ne pas compromettre le relevé d’empreintes. Des halogènes sur pied illuminèrent le pré lui donnant l’aspect d’une scène de théâtre en plein air. Le panier fut glissé dans un grand sachet. Sur la piste, les spécialistes photographièrent et moulèrent empreintes de chaussures, de pneumatiques afin d’en déterminer la pointure pour les premières et la marque pour les secondes.

Boboko s’étonna de ne pas trouver la serpette de Nina. Elle ne s’en séparait jamais pour couper proprement les tiges des fleurs ou les herbes médicinales. Cela expliquait peut-être le sang retrouvé. Elle avait dû se blesser ou blesser son agresseur.

Si elle avait pu lui en mettre un coup ! On retrouverait peut-être l’ADN de ce salopard, espéra-t-il.

Une heure plus tard, les véhicules désertèrent le pré et regagnèrent, les uns, la brigade, les autres, le camp après avoir déposé Gabin et sa bécane devant sa porte.

Sa mère apparut sur le seuil, très remontée.

— J’ai eu tes messages, heureusement. Bonté divine ! Où étais-tu donc ? Vu ta tête, vous n’avez pas retrouvé Nina !

— Je vais tout t’expliquer.

Il rangea son VTT, revint à la cuisine se rincer les mains et mit la table. Malgré l’heure tardive, ils s’installèrent pour dîner. Sa mère déposa une part de tourte à la courgette fumante dans son assiette.

— J’n’ai pas très faim.

Émue, la maman, fixa le visage blafard de son fils et lui caressa l’avant-bras. D’une voix très douce lui enjoignit :

— Raconte.

Quand il eut terminé de narrer sa triste soirée, elle quitta son siège, se rapprocha pour lui prendre la tête entre les mains et épongea avec le plat de ses pouces deux larmes pudiques.

— Ne sois pas inquiet. Ils vont la retrouver.

***

Le samedi, dès l’aube, la brigade de recherche s’activait. Les hommes grenouilles sondèrent le lac artificiel de long en large et en profitèrent pour remonter une partie du squelette d’un bovin qui polluait l’eau et les fonds vaseux. Occupés dans les profondeurs, ils ne remarquèrent ni la gigantesque buse fermée par une porte grillagée à peine caressée par les remous du lac ni la barque amarée.

La gendarmerie, épaulée par tous les membres du camp tsigane et la plupart des habitants, organisa une battue et passa au crible, les vingt-sept kilomètres carrés que comptait la petite commune pendant plus d’une semaine, sous l’œil désintéressé de certains autochtones qui n’estimaient pas ou peu les gens du voyage.

Malgré sa blessure, dissimulée sous un pansement sommaire, Le Jaune, aux côtés de Boboko, ne manqua pas un jour d’exploration du territoire et Gabin les rejoignait le week-end.

Rien ne fut négligé : fermes, résidences secondaires, dont les gardiens ou voisins avaient le double des clés, bâtiments agricoles, pâtures, forêts, puits. Fouillées aussi, les caravanes et même la vieille roulotte, vestige du temps passé.

Au sein de tout l’hexagone, du nord au sud, la nouvelle de la disparition de l’une des leurs se répandit chez les tsiganes au-delà des frontières. Et c’est ainsi que camping-cars, caravanes vinrent grossir le camp de Boboko. Le parc automobile était si envahissant que Zélia dut ouvrir l’une de ses pâtures.

Nina restait introuvable.

Une propriété, loin du cœur du village, dissimulée dans la forêt, restait à vérifier. Celle d’Hugo. La vingtaine, orphelin, depuis cinq ans, à la mort de celle qui aurait dû lui servir de mère, il était devenu le laissé pour compte par cette société qui prônait l’esthétique. Victime d’un coup de pied de cheval reçu en pleine face, qui avait non seulement marqué sa pommette droite de l’empreinte du fer, mais aussi fracturé les deux mandibules consolidées au fil du temps sans soins appropriés, une partie de son visage était très abîmée et il n’arrivait plus à articuler correctement.

Il survivait grâce à un emploi de jardinier et à Zélia qui, de temps à autre, l’embauchait. Sa seule compagnie, les animaux : chats, volailles, une vieille chienne, Zoé, et une chèvre, Chipie, mère de substitution d’un faon orphelin, sauvé in-extremis du jet de plombs des chasseurs.

Il revenait du poulailler, les mains encombrées par la ponte du jour. À la vue des tenues bleues d’interventions, il sursauta, échappant les œufs qui vinrent s’écraser sur le sol, éclaboussant du même coup les rangers immaculées des deux hommes.

— Eh, mon garçon ! T’es hyper émotif ou t’as pas la conscience tranquille, lança l’un d’eux.

Il les salua et, tout tremblant, ramassa comme il put les coquilles et entra dans la cuisine se passer les mains sous le robinet. Les gendarmes le suivirent et découvrirent un collier, suspendu à un bouton de porte du bahut, dont la technique de tressage avait des similitudes avec celle du bracelet trouvé par Gabin et mit sous scellé.

— Dis donc, toi, on ne t’a pas vu lors de l’interrogatoire des villageois ! T’as intérêt à venir au plus vite.

C’en était trop pour Hugo. Effarouché par ce remue-ménage, il s’enfuit par la porte arrière qui menait à la grange.

Zélia, affairée à ses clapiers, entendit haleter tout près. Elle se retourna. Hugo, les joues cramoisies par l’effort et le regard empli de peur, s’agrippait aux mailles du grillage. Elle comprit, quand elle vit, à ses trousses, la maréchaussée essoufflée. Deux ou trois secousses d’une main énergique à son large tablier pour le débarrasser des brins de paille, elle sortit, referma la porte à claire-voie et toisa les intrus. Hugo en profita pour se mettre à l’abri, derrière elle.

— Bonsoir, madame. Tu nous auras fait cavaler, mon gaillard ! dit le plus costaud en toisant le garçon.

— Vous n’avez pas honte de l’effrayer ainsi ?

— Nous avons retrouvé ceci chez lui. C’est le même que celui remit par le jeune Gabin. Nous aimerions bien entendre ce qu’il a à nous dire.

Zélia, la cinquantaine, le chignon branlant, veuve d’un agriculteur, n’avait rien perdu de la gouaille et du culot de son peuple. Ses doigts s’agitèrent et dénouèrent le foulard laissant apparaitre les perles multicolores d’un collier.

— Tenez, regardez ! Moi aussi j’en ai un. Elle en a offert à tout le monde, la petite ! Et pour ce qui est de vous aider, le pauvre ne le pourra pas, il ne parle pas ou si peu. Et puis, hier, il était ici avec moi, toute la journée. Je l’ai fait dîner et il est rentré chez lui vers vingt et une heure.

 

Hugo, blanchi pour l'instant, les deux agents n’insistèrent plus et s’en retournèrent bredouilles.

Une cinquantaine de personnes furent entendues ainsi que la vingtaine de tsiganes qui campaient sur la commune et leurs empreintes relevées pour les retirer de la liste des éventuels suspects, tout comme celles de Gabin. Son interrogatoire se déroula identique à celui des autres, au poste. Étant mineur, la présence de sa mère fut obligatoire. Il put relater quelques faits découverts par Le Jaune, le buron et le panier.

Au moment de quitter le bureau du chef de brigade, Gabin l’interpella timidement.

— Je pourrai récupérer le bracelet pour le rendre à Nina ?

L’officier lui tapota l’épaule.

— Oui, mon garçon, une fois l’enquête terminée.

Deux semaines plus tard, la scientifique ajouta au désarroi des nomades en confirmant, après analyses du sang retrouvé sur la chaussure et la paille, qu’il s’agissait bien du même groupe sanguin que celui de la jeune fille.

Les jours s’écoulaient et l’espoir de revoir Nina vivante s’amenuisait. Guitares, violons et accordéons, enfermés dans leur écrin, se turent. Tout comme les rires qui fusaient autour du feu au crépuscule. Habituellement si joyeux et convivial, le camp devint aussi silencieux et rigide que celui des militaires.

Les nomades reprirent la route les uns du Nord, les autres du Sud et de la Suisse.

Gabin retourna toutes les fins de semaine, jusqu’à la fin du mois d’octobre, à la cabane espérant voir surgir Nina.

Le froid s'installa et il cessa d'y venir.

Les nomades du Sud, du Nord et de Suisse, venus en renfort reprirent la route.

 

* Dans quelques jours, le premier chapitre...

 

Chapitre 1 (première partie)

« Qu’est-ce donc qu’une mauvaise herbe, sinon une plante dont on n’a pas encore découvert les vertus. (Ralph Waldo Emerson)

« La disparition d’une adolescente », fait divers, somme toute, banal. Une fugue… un mal être… chacun y allait de son avis. Impensable ! Arguaient ceux qui connaissaient bien Nina. Pourquoi aurait-elle commis un acte si irréfléchi ? Elle vivait heureuse auprès de sa famille dans ce village de montagne altigérien[1] niché au pied du Mont Mouchet[2].

Dix mois avaient passé depuis ce funeste vendredi de septembre 2019.

Restés sur place pour les besoins de l’enquête, sans y prendre garde, le camp se sédentarisa peu à peu. Il ne sillonna plus les routes de France, pas même pour vénérer, en mai, Sara la Noire, lors du pèlerinage aux Saintes Maries de la Mer. Il gardait, en secret, l’espoir si infime fut-il.

Le malheur qui avait frappé la famille de Boboko et Zélia avait ému et changé l’état d’esprit des villageois et leur avaient appris à mieux connaitre ce peuple « manouche » qu’ils considéraient dorénavant comme des autochtones.

Leur condition financière s’améliora. Le maire, et certains propriétaires de parcelles où grandissait la gentiane jaune, autorisèrent et apprirent aux hommes à récolter la précieuse racine. Ainsi, dès le mois de juin jusqu’à la fin d’août, ils s’activaient dans les champs munis de la fourche du diable dont les deux dents rappelaient les cornes de l’esprit du mal. En une journée, chaque travailleur pouvait en extraire deux cents kilos. Les femmes n’étaient pas sans travail, selon la saison, elles cueillaient fleurs et plantes sauvages pour la parfumerie ou la pharmacologie.

L’enquête était au point mort. Comme promis, une fois les empreintes relevées, le bracelet de Nina avait été restitué à Gabin qui le portait au poignet malgré les railleries, dont il se fichait éperdument, de ses amis du lycée.

Les grandes vacances débutaient sous le soleil de juillet et l’adolescent reprit le sentier de la forêt. La petite masure abandonnée, nichée entre les trois frênes, était toujours debout, les branches des feuillus semblaient avoir grossi dans le seul but de former un cocon.

Gabin monta, avec prudence l’échelle de bois −la dernière fois, il avait, dans sa précipitation, brisé l’un des barreaux. La porte, en fines branches de noisetiers tressées, ballottée par la brise devrait être refaite. Le garçon entra. Des souvenirs, beaux et tristes, s’imposèrent ; le premier baiser, les caresses maladroites à la découverte de leur corps inexpérimenté. Son cœur se serra douloureusement comme pincé par des doigts.

Ému, il ressortit, ignora l’escalier, et sauta à pieds joints sur le sol recouvert d’humus. Il enfourcha son V.T.T. et pédala sans but précis pour assécher son chagrin.

Un renard surgit tout à coup devant lui. Gabin stoppa brusquement à quelques centimètres. L’animal, magnifique, avec son pelage brun doré et ses grands yeux en amande, ne parut pas effrayé. Bien au contraire, il s’assit et attendit. Un joyeux aboiement se propagea dans la forêt, répercuté par les arbres. Le Jaune bondit sur la bête comme l’aurait fait un chien de chasse avec du gibier.

— Non ! Ne lui fais pas de mal, supplia l’adolescent.

Ahuri, Le Jaune l’observa un court instant et reprit son jeu. Car c’en était un. Gabin le comprit vite. De roulades en bonds, de léchouilles en claquement de dents, les deux compères s’amusaient.

Avec des gestes lents, le garçon posa sa bicyclette à plat et s’accroupit. Il remarqua, à ce moment-là, un harnais avec une petite poche qui se balançait à son tout petit cou et se perdait dans la toison brune.

Il est apprivoisé.

 Goupil interrompit ses galipettes et s’approcha. Gabin s’immobilisa et sentit la truffe fraîche effleurer ses doigts inertes sur sa cuisse. Avec une lenteur calculée, il leva la paume et caressa la petite tête. Quand il voulut palper le collier, la bête se défila.

— Ok, ok.

Il se remit lentement debout et abandonna à regret son insolite et original nouvel ami. Un travail important l’attendait. Pendant les actions menées pour tenter de retrouver Nina, il s’était fait un nouveau camarade en la personne d’Hugo, l’orphelin. Ce drame leur avait permis de mieux se connaître et de s’apprécier. Et sur les conseils insistants de Zélia, qui l’avait pris en pitié, il lui réapprenait à lire, à écrire et à parler. Depuis que ce cheval avait pris son visage pour un punchingball, ce dernier avait du mal à s’exprimer correctement. Loin d’être idiot, comme le prétendait les mauvaises langues, il mettait tout son cœur à s’instruire et le résultat, quoiqu’ardu, fut toutefois probant.

Ce soir-là, il repartit, raccompagné par Zoé, la chienne trottineuse, bientôt rejointe par Chipie la chèvre et son faon. Tout ce petit monde stoppa à la limite de la propriété, comme contenu par un fil invisible.

Gabin fit un crochet par la ferme de Zélia acheter les œufs commandés par sa mère. Il appuya son vélo contre le mur de la maison et s’empara du sachet avec la boîte. Devant l’entrée principale, il frappa.

— Entrez !

La porte s’ouvrit avant qu’il ait posé la main sur la poignée. Le Jaune surgit et sans ménagement, appliqua –encore–, ses deux grosses pattes avant pleines de griffes sur son torse. Surpris, Gabin tomba à la renverse et la boîte à œufs dans le pochon de papier s’envola.

— Whooo ! Du calme mon vieux. On s’est vus, y a pas une heure !

Un petit rire étouffé résonna. Une jeune fille, appuyée contre le chambranle, un immense panier à la main, observait la scène.

 



[1] Haute-Loire

[2] Montagne ou a eu lieu la bataille entre maquisards et allemands en 1944

 

Sam la renarde du parc animalier de Sainte Croix 57 810 Rhodes

Fin du chapitre 1

 

Pour atténuer la douleur de l’impact des griffes, l’adolescent se massa par-dessus son tee shirt. Penaud, il ne trouva rien de mieux que de cafouiller un bonjour inaudible. En retrait, Zélia pouffait.

— Les filles te font perdre tes moyens, mon garçon ?

Avant de se relever, il récupéra le sac et la boîte.

— Bonsoir, ma mè… re en voudrait une douzaine.

— Donne.

Confus et rougissant, il tendit la boîte et le billet de cinq euros. Zélia s’éloigna et Gabin se prit soudain d’intérêt pour ses baskets.

— Bonjour, je suis Levna, la sœur de Nina. Tu es Gabin. Elle a souvent évoqué vos petites virées. Je vois que tu portes l’une de ses créations.

Gêné, le garçon baissa les yeux sur le bracelet. Il enfouit la main dans sa poche, releva la tête et son regard croisa celui de Levna. Son trouble augmenta quand deux fossettes se formèrent à la commissure des lèvres, comme sur le visage de Nina.

— Ou… oui. Elle m’a parlé de toi également, mais à vrai dire assez peu. Tu étais absente ?

Il n’était plus allé au camp depuis plusieurs mois, ne l’avait jamais vu chez Zélia, ni même croisée sur les chemins.

— Je viens de rentrer. J’étais en Suisse… en… formation.

Levna joua avec Le Jaune et sa casquette tomba. Gabin se surprit à la contempler. Quelques différences physiques avec Nina : plus grande et plus élancée, des cheveux longs, bruns, tressés. Elle remit son couvre-chef, ajusta la visière qui ombragea son visage à la peau mate et dissimula ses grands yeux noisette.

Zélia réapparut et lui tendit le sac, ce qui mit un terme à son trouble.

— Merci, madame.

— S’il te plaît, raccompagne-la, je serai plus tranquille. Ah, j’oubliais ! La monnaie est sous un œuf. J’en ai mis deux en plus dans du papier journal, alors ne fais pas l’omelette en chemin !

Avec attendrissement, elle les regarda s’éloigner, Le Jaune sur les talons, tantôt de l’un, tantôt de l’autre.

Pour avancer au rythme de Levna, Gabin tint son vélo d’une main et marcha à ses côtés. Il se pencha et désigna le grand panier d’osier rempli, par la générosité de Zélia, de légumes, d’un lapin et de deux volailles dont les plumes et le long cou inerte s’agitaient au rythme de la marche.

— Donne, dit-il en désignant le cabas, je vais le suspendre au guidon. Eh ! C’est hyper lourd ! Tu dis avoir terminé ta formation, tu as étudié quoi ?

Sa bouche se tordit dans une moue enfantine, elle répondit, évasive.

— Je te raconterai un de ces jours.

Gabin tiqua mais n’insista pas. Certaines questions lui brûlaient la langue, cependant, il poursuivit avec des banalités affligeantes.

— Nina m’a dit être ta cadette d’un an, donc tu as dix-sept ans c’est ça ?

— Je vais bientôt les fêter.

— Et, comme… elle, tu fais la cueillette des plantes sauvages ?

Prononcer ces dernières syllabes, lui couta. La douleur insidieuse terrée depuis la tragédie, engendrait des vagues désagréables dans son bas-ventre.

— Oui. Zélia, ma grand-tante, m’apprend à les reconnaître et à les utiliser. Demain, je vais en cueillir, tu pourrais venir ! Si tu n’as rien de plus intéressant à faire, bien sûr. Et on pourrait pique-niquer au bord du ruisseau.

— Oui ! explosa-t-il sans retenue. Et moi je t’inviterai à la cabane.

— Nina m’en a tellement parlé que j’ai l’impression d’y être déjà allée. En fait, je m’y suis rendue… elle a pris cher pendant l’hiver.

— C’est peu dire ! Il va falloir que j’y retourne et envisage de la consolider.

La gêne réciproque se dissipa naturellement et ils discutèrent comme de vieux amis qui se retrouvent après une séparation.

Ils arrivèrent au camp. Boboko, en bras de chemise, désherbait le potager de la communauté. Il les entendit jacasser, se redressa et retira son chapeau pour éponger la sueur de son front. Arrivé à sa hauteur, Gabin le salua.

— Merci, gavalo[1] !

— De quoi ?

— D’avoir accompagné ma petite-fille.

Gabin se garda bien de préciser que c’était l’idée de Zélia. La disparition de Nina avait fragilisé toute la communauté qui était devenue méfiante et prudente.

Il tendit le cabas à Levna et prit, à regret, congé.

— Bon, ben, salut !

Levna n’attrapa pas le panier de victuailles, au contraire agrippa l’épaule du garçon. De la sentir si proche, il crut défaillir et plus encore après le baiser moelleux qu’elle déposa sur sa joue.

— Demain, je vais à La Sillarde, Ça te dit ? chuchota-telle.

— Oui. À quelle heure ?

— Je ne suis pas une lève tôt ! Pas avant neuf heures.

— J’y serai. À demain.

Gabin enfourcha son vélo, les jambes et le cœur en guimauve, il reprit le chemin de sa maison. Un coup d’œil par-dessus son épaule lui confirma que Levna n’avait pas bougé et agitait la main dans un dernier signe. Il chantonna jusqu’à chez lui et regretta de ne pas avoir recroisé le renard sur son chemin.

 



[1] Gamin, jeune

 

 

 

Ambiance